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Les Paradis artificiels

Inspiré des Confessions d'un Anglais mangeur d'opium (1822) de Thomas de Quincey.

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Le Spectre du Brocken

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   Par un beau dimanche de Pentecôte, montons sur le Brocken. Éblouissante aube sans nuages ! Cependant Avril parfois pousse ses dernières incursions dans la saison renouvelée, et l'arrose de ses capricieuses averses. Atteignons le sommet de la montagne; une pareille matinée nous promet plus de chances pour voir le fameux Spectre du Brocken. Ce spectre a vécu si longtemps avec les sorciers païens, il a assisté à tant de noires idolâtries, que son coeur a peut-être été corrompu, et sa foi ébranlée. Faites d'abord le signe de la croix, en manière d'épreuve, et regardez attentivement s'il consent à le répéter. En effet, il le répète; mais le réseau des ondées qui s'avance trouble la forme des objets et lui donne l'air d'un homme qui n'accomplit son devoir qu'avec répugnance ou d'une manière évasive. Recommencez donc l'épreuve, “cueillez une de ces anémones qui s'appelaient autrefois fleurs de sorcier, et qui jouaient peut-être leur rôle dans ces rites horribles de la peur. Portez-la sur cette pierre qui imite la forme d'un autel païen; agenouillez-vous, et, levant votre main droite, dites : Notre père, qui êtes aux cieux !... moi, votre serviteur, et ce noir fantôme dont j'ai fait, ce jour de Pentecôte, mon serviteur pour une heure, nous vous apportons nos hommages réunis sur cet autel rendu au vrai culte!
   - Voyez! l'apparition cueille une anémone et la pose sur un autel; elle s'agenouille, elle élève sa main droite vers Dieu. Elle est muette, il est vrai ; mais les muets peuvent servir Dieu d'une manière très acceptable.” Toutefois, vous penserez peut-être que ce spectre, accoutumé de vieille date à une dévotion aveugle, est porté à obéir à tous les cultes, et que sa servilité naturelle rend son hommage insignifiant. Cherchons donc un autre moyen pour vérifier la nature de cet être singulier. Je suppose que, dans votre enfance, vous avez subi quelque douleur ineffable, traversé un désespoir inguérissable, une de ces désolations muettes qui pleurent derrière un voile, comme la Judée des médailles romaines, tristement assise sous son palmier. Voilez votre tête en commémoration de cette grande douleur. Le fantôme du Brocken, lui aussi, a déjà voilé sa tête, comme s'il avait un coeur d'homme et comme s'il voulait exprimer par un symbole silencieux le souvenir d'une douleur trop grande pour s'exprimer par des paroles.
   “Cette épreuve est décisive. Vous savez maintenant que l'apparition n'est que votre propre reflet, et qu'en adressant au fantôme l'expression de vos secrets sentiments, vous en faites le miroir symbolique où se réfléchit à la clarté du jour ce qui autrement serait caché à jamais. ” Le mangeur d'opium a aussi près de lui un Sombre Interprète, qui est, relativement à son esprit, dans le même rapport que le fantôme du Brocken vis-à-vis du voyageur.
   Celui-là est quelquefois troublé par des tempêtes, des brouillards et des pluies ; de même le Mystérieux Interprète mêle quelquefois à sa nature de reflet des éléments étrangers. “ Ce qu'il dit généralement n'est que ce que je me suis dit éveillé, dans des méditations assez profondes pour laisser leur empreinte dans mon coeur. Mais quelquefois ses paroles s'altèrent comme son visage, et elles ne semblent pas celles dont je me serais plus volontiers servi. Aucun homme ne peut rendre compte de tout ce qui arrive dans les rêves. Je crois que ce fantôme est généralement une fidèle représentation de moi-même; mais aussi, de temps en temps, il est sujet à l'action du bon Phantasus, qui règne sur les songes. ” On pourrait dire qu'il a quelques rapports avec le choeur de la tragédie grecque, qui souvent exprime les pensées secrètes du principal personnage, secrètes pour lui même ou imparfaitement développées, et lui présente des commentaires, prophétiques ou relatifs au passé, propres à justifier la Providence ou à calmer l'énergie de son angoisse, tels enfin que l'infortuné les aurait trouvés lui même si son coeur lui avait laissé le temps de la méditation.


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L'étude du beau est un duel où l'artiste crie de frayeur avant d'être vaincu. -- Toute littérature dérive du péché. -- Etre un homme utile m'a toujours paru quelque chose de bien hideux. -- Mais qu'importe l'éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l'infini de la jouissance ! -- Sois sage, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille ! -- Qu'est-ce que l'amour ? Adorer, c'est se sacrifier et se prostituer. -- Tout homme bien portant peut se passer de manger pendant deux jours, de poésie, jamais. -- Pourquoi les démocrates n'aiment pas les chats, il est facile de le deviner. Le chat est beau; il révèle des idées de luxe, de propreté, de volupté, etc. -- L'étude du beau est un duel où l'artiste crie de frayeur avant d'être vaincu. -- Il est de certaines sensations délicieuses dont le vague n'exclut pas l'intensité; et il n'est pas de pointe plus acérée que celle de l'Infini. -- Il y a, dans tout homme, à toute heure, deux postulations simultanées, l'une vers Dieu, l'autre vers Satan. L'invocation à Dieu, ou spiritualité, est un désir de monter en grade; celle de Satan, ou animalité, est une joie de descendre.Le Salon de 1845
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"La femme est naturelle, c'est-à-dire abominable." 
 
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